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Benjamin Stora : « L’enrichissement qu’ont apporté les étrangers en France. »

par Véronique Giraud
Benjamin Stora  © Musée de l’histoire de l’immigration
Benjamin Stora © Musée de l’histoire de l’immigration
Livre Sciences Humaines Publié le 07/10/2014
Nouveau président de la Cité de l’Immigration, l’historien Benjamin Stora veut relever le défi d’un musée boudé par les politiques et les visiteurs.

A la différence de pays comme les Etats-Unis, l’immigration semble être un gros mot en France. Comment l’explique l’historien que vous êtes ?

La peur de l’autre, de l’étranger c’est une vieille histoire française. La peur des Italiens au XIXe, des migrants juifs de l’Europe centrale dans les années 30, ou encore la peur des Algériens qui travaillaient en France pendant la guerre d’Algérie. Cette idée est en rapport avec la construction de l’Etat nation, la définition des frontières, la référence qui s’établit avec les papiers, la carte d’identité.

Le second aspect, c’est que la France dans sa culture politique a une très faible notion de la mobilité. Ayant travaillé sur l’histoire coloniale depuis longtemps, je me suis aperçu que la colonisation n’impliquait pas tellement les habitants de la métropole, mais les armées, et surtout ceux qu’on a appelés les colons. Au siècle de la mondialisation, on ne peut plus raisonner comme cela.

 

Comment intervient alors le musée de l'histoire de l'immigration ?

A partir de cette étroitesse nationale, le musée doit au contraire montrer tout l’enrichissement qu’ont apporté les étrangers en France, dans tous les domaines. Parce que c’est cela qui a fabriqué la nation française, irriguant sa culture et son économie, depuis pratiquement deux siècles d’immigration en France.

Il doit aussi montrer les difficultés, les obstacles rencontrés sur cette voie, qu’on appelle aujourd’hui l’intégration, de ceux venus travailler en France.

 

Comment faire venir le grand public ?

Le fait que j’apparaisse moi, historien, au lieu d’un politique, c’est déjà un changement. Depuis trente ou quarante ans, j’ai construit l’essentiel de mon activité autour de la question de l’immigration, et la presse s’en est fait écho.

Ensuite, il faut des expositions davantage en prise avec le grand public d’aujourd’hui. Par exemple sur la haute-couture et l’immigration valorisée par les témoignages d’Azzedine Alaïa ou Balanciaga… Ou faire venir dans la Cité des grands sportifs connus issus de l’immigration, des gens de théâtre, du cinéma.

Un troisième aspect est une réflexion sur les clandestins, les sans-papiers. Qui sont-ils ? Pourquoi ces gens partent, quels sont les motifs d’arrachement à un pays, qu’il s’agisse de l’Erythrée, du Soudan, de la corne de l’Afrique, de Syrie…?

 

Musée de l’histoire de l’immigration
293 Avenue Daumesnil, 75012 Paris

 

L'exposition "Fashion Mix". Mode d'ici, créateurs d'ailleurs. Cristobal Balenciaga, Azzedine Alaïa, Issey Miyake, Yohji Yamamoto… Outre un immense talent et leur passion pour la couture, ils ont en commun d’avoir quitté leur pays pour venir vivre en France. Entre parcours personnels et histoire de la mode, l'exposition Fashion Mix, conçue avec le musée de la mode du Palais Galliéra, raconte une autre histoire de l'immigration, celles d'hommes et de femmes, artisans et créateurs, qui ont contribué à faire de Paris la capitale internationale de la mode. Une façon de découvrir en beauté le Musée de l’histoire de l’immigration. L'exposition est prolongée jusqu’au 28 juin 2015.

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