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Riad Sattouf détestostérone la BD à Angoulême

par Véronique Giraud
Le dessinateur et réalisateur Riad Sattouf DR
Le dessinateur et réalisateur Riad Sattouf DR
Livre BD Publié le 06/01/2016
Et si le festival d’Angoulême avait raté le rendez-vous avec l’un des combats qui a agité et agite toujours notre société, celui de l’égalité sexuelle ? En 42 ans de festival, une seule créatrice a obtenu le Grand Prix du festival de la BD. Une situation que Riad Sattouf a bousculé en quelques lignes via Facebook.

Par sa réaction sur Facebook alors qu'il venait de découvrir son nom dans la liste des nominés du Grand Prix du festival de la BD d’Angoulême, Riad Sattouf a provoqué l’événement. Déclarant souhaiter « être retiré de la liste » pour céder sa place à une femme, au motif qu’ « il y a beaucoup de grandes artistes qui mériteraient d’y être », en citant quelques-unes et « en espérant toutefois réintégrer la liste le jour où elle sera plus paritaire ». Il a suffi de quelques lignes pour déclencher de nombreux partages et like, puis, dans la foulée, les réactions individuelles de plusieurs nominés, suscitant même la création d’un collectif d’auteurs appelant au boycott du vote, et finalement contraindre les organisateurs du festivals à annoncer qu’ils allaient « sans enlever aucun autre nom, introduire de nouveaux noms d’auteures » dans la liste des 30 sélectionnés.

On ne peut que saluer le courage de cet homme, - un vrai a-t-on envie de rajouter -. On comprend mieux comment le créateur des Histoires vraies d’Esther A. parle aussi bien en lieu et place d’une petite fille de 10 ans vivant à Paris… On ne regardera plus ces dessins, on ne lira plus jamais ses bulles de la même manière sur la dernière page de l’Obs (son éditeur, Allary Éditions, annonce la parution le 21 janvier du roman graphique tiré de ces planches*). Il aura suffi de quelques lignes pour enfin réveiller les consciences, et agrandir une plaie déjà béante. Et la réponse de Franck Bondoux, le directeur du festival, n'a rien arrangé : choisissant de comparer les œuvres du dernier-né des beaux-arts à celles du Louvre, et en justifiant la présence masculine exclusive des lauréats du festival par le fait que « les artistes qui le composent ont une certaine maturité et un certain âge » (du même coup, Riad Sattouf, né en 1978, a pris un sacré coup de vieux…)

Un prix ne reflète pas la réalité d’une communauté mais, à l’aune de l’histoire, il reste l’ADN d’un festival, il aide aussi un auteur à se propulser dans la sphère publique. En quarante-deux ans de festival, Florence Cestac est la seule femme à avoir été distinguée par le Grand Prix d’Angoulême. Un signe peu encourageant pour les créatrices BD qui ne représentent aujourd'hui en France que 12,6% de la profession. Reste à savoir comment la relève féminine appréciera cet acte… A suivre.

 

Les 30 nominés : Brian M. Bendis (Etats-Unis) Christian Binet (France), Christophe Blain (France), François Bourgeon (France), Charles Burns (Etats-Unis), Pierre Christin (France), Daniel Clowes (Etats-Unis), Richard Corben (Etats-Unis), Cosey (Suisse), Etienne Davodeau (France), Nicolas de Crécy (France), Edika (France), Carlos Gimenez (Espagne), Emmanuel Guibert (France), Hermann (Belgique), Alejandro Jodorowsky (Chili), Stan Lee (Etats-Unis), Milo Manara (Italie), Taiyô Matsumoto (Japon), Lorenzo Mattotti (Italie), Frank Miller (Etats-Unis), Alan Moore (Grande-Bretagne), Quino (Argentine), Riad Sattouf (France), Joann Sfar (France), Bill Sienkiewicz (Etats-Unis), Jirô Taniguchi, Naoki Urasawa, Jean Van Hamme (Belgique), Chris Ware (Etats-Unis).

* Les Cahiers d'Esther - Roman graphique de 56 pages de Riad Sattouf - Allary Éditions, 16,90€. En librairie le 21 janvier 2016

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