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Bordel de noms de… régions !

par Lucie Goar
Livre Sciences Humaines Publié le 14/01/2016
Treize régions, c’est treize nouveaux noms si l’on ne veut pas juxtaposer une série de noms de territoires. Les régions françaises, fruit des bricolages de la IVe République, sont aujourd’hui en plein travail d’appellation. Et bien sûr quelques irrédentistes bien minoritaires veulent faire passer leurs intérêts. De quoi prévoir quelques bons moments d’amusements.

Les 22 régions que connaissait encore la France l’an dernier était une construction arrangée décidée bureaucratiquement sous la IVe République (1956) à laquelle le père de la décentralisation mitterrandienne, le marseillais Gaston Defferre, membre du gouvernement de l’époque prêta un œil attentif. Pour justifier le découpage, non pour l’opinion publique qui ne s’y intéressait guère, mais pour les différents niveaux d’une république qui se confirmait comme la plus monarchiste d’Europe, on confia une mission à un jeune énarque qui pouvait ainsi affirmer ses ambitions, mais l’histoire n’a pas retenu le patronyme de Serge Antoine. Le bricolage d’alors avait en fait peu d’importance en raison de l’absence de compétences dévolues aux régions, mais il sépara des entités et en regroupa d’autres sans souci de critères historiques, ni même d’efficacité. La dimension et le poids respectifs des régions n’étaient pas équilibré.

 

Un découpage entre barons. Ainsi, jusqu’à l’an dernier, ni les liaisons intrarégionales, ni les pôles économiques, ni surtout les affinités culturelles ne furent prises en compte. Nantes, siège du château des ducs de Bretagne, fut séparée de sa région, les territoires cathares du Languedoc. La Corse rattachée à la Provence, la Picardie abandonnée au sort de minuscule territoire.

Invention géniale des administratifs français, les régions se trouvèrent affublées de noms à rallonge, impossibles à retenir ou à faire rentrer dans un formulaire : Provence-Alpes-Côtes d’Azur-Corse (cette dernière n’ayant été détachée qu’en 1970) étant la plus exemplaire.

En 2016, les choses ont un peu évolué : Nantes n’est toujours pas en Bretagne, l’Alsace fait route commune avec la Lorraine, histoire de ne pas décevoir la chanson, mais aussi avec la Champagne et les Ardennes. Le regroupement devient un casse-tête pour trouver un nom, tâche première sur laquelle planchent, avec renforts de communicants et de sondages (donc de fonds publics), les conseils nouvellement élus.

 

Le cas du Languedoc. Le cas le plus simple semble être celui du Languedoc-Roussillon qui convole avec Midi-Pyrénées. Voilà refondée l’ancienne province du Languedoc. L’ancienne unité linguistique régionale (l’Occitan, langue bas-romane que l’on parlait au Sud de la Loire, du Piémont à la Catalogne), l’ancienne province royale qui tenait ses états généraux à Pézenas, ville de Molière, a conservé des relations internes de Nîmes à Toulouse, et une culture commune. Là encore pourtant, les chamailleries de clocher se pointent. Le fameux président du Languedoc-Roussillon, Georges Frêche, avait tenté de changer ce nom composé en proposant Septimanie, puisque Languedoc était quand même également le territoire des Toulousains. Certains irrédentistes du Roussillon s’y opposèrent à juste titre, Septimanie (nom éphémère sous l’administration romaine) n’ayant plus aucune résonance dans les territoires concernés. Mais aujourd’hui, on entend du côté de Perpignan qu’il ne serait pas concevable que le mot Catalan ne figure pas dans l’appellation. Il faudrait alors y ajouter la Camargue, les Cévennes, la Montagne noire… et s’opposer à la région catalane espagnole qui a déjà le nom et veut même en faire un pays.

Dans la vraie vie, la plupart des citoyens ont plus de raison. Alors pourquoi pas un référendum ? L’argent public dépensé le serait au moins en toute démocratie.

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