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A Tours, la cité de la gastronomie c’est tout le Val de Loire

par Pierre Magnetto
La bibliothèque de l’institut européen d’histoire et des cultures de l’alimentation, institut à l’origine de l’inscription du repas gastronomique des Français au patrimoine immatériel de l’humanité, imprime une spécialisation universitaire à Tours cité internationale de la gastronomie en Val de 
Loire.©Daniel Bourry
La bibliothèque de l’institut européen d’histoire et des cultures de l’alimentation, institut à l’origine de l’inscription du repas gastronomique des Français au patrimoine immatériel de l’humanité, imprime une spécialisation universitaire à Tours cité internationale de la gastronomie en Val de Loire.©Daniel Bourry
Style de vie Gastronomie Publié le 10/03/2016
Membre du réseau des cités internationales de la gastronomie, Tours met en œuvre un projet inédit comparé à ceux développés par les autres villes. Ici, la cité c’est tout le territoire du Val de Loire grâce à la mise en mouvement de tous les acteurs concernés.

C’est à Tours que tout a commencé et, c’est un juste retour des choses que la ville ait été sélectionnée en 2013 pour faire partie du réseau des Cités internationales de la gastronomie. C’est de la capitale de la Touraine que tout est parti parce-que l’Institut européen d’histoire et des cultures de l’alimentation (IEHCA) créé par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche en 2002, non seulement y a son siège, mais est à l’initiative de l’inscription du repas gastronomique des Français au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Unesco en 2010.

Un réseau de 400 chercheurs en Europe L’Institut fédère un réseau de près de 400 chercheurs en Europe qui, à travers diverses disciplines - histoire, géographie, sociologie, philosophie, ethnologie… - s’intéressent à l’alimentation sous un angle culturel. « Quand en 2006 la France a ratifié la charte de l’Unesco sur le patrimoine culturel immatériel de l’humanité et que j’ai lu ce texte presque par hasard, j’ai eu le sentiment qu’il avait été écrit pour la cuisine et je me suis dit, pourquoi ne pas déposer un dossier qui ait trait au patrimoine culinaire et gastronomique », se souvient François Chevrier, directeur de l’IEHCA. La suite on la connaît, le dossier sera instruit par la Mission française du patrimoine et des cultures alimentaires jusqu’à son aboutissement.

Les quatre cités retenues sont chacune dédiées à une thématique principale : nutrition et santé à Lyon, vin et œnologie à Dijon, approvisionnement des centres urbains à Paris-Rungis. Pour Tours, ce sera la recherche et la formation du point de vue des sciences sociales.

Des formations universitaires Il faut dire que la ville possède déjà une expertise en la matière. L’IEHCA qui dépend de l’Université François Rabelais a mis en place un Pôle alimentation dispensant des formations diplômantes (DUT, Licences, Masters) et, elle organise chaque année une université européenne d’été dédiée à la thématique. Le 21 janvier dernier, Serge Babary, le maire de la ville, a annoncé la mise à disposition d’un ancien bâtiment universitaire, La villa, située boulevard Berranger en cœur de ville. En cours de rénovation, il pourra dès le mois de mai accueillir quelques événements mais surtout, à la rentrée 2016, il sera opérationnel pour abriter les structures de formation liées à l’alimentation, qu’elles soient universitaires ou pas. En effet, il ne s’agira pas seulement de former des chercheurs, mais aussi de développer des formations ayant des applications plus directes. « Par exemple, nous réfléchissons avec l’IUT de Tours qui propose un DUT de journalisme et de communication, à la création d’une option de critique gastronomique », poursuit Francis Chevrier.

La cité c’est le territoire Mais Tours cité internationale de la gastronomie en Val de Loire, tel est son nom de baptême, c’est un projet bien plus global. Il intègre trois autres dimensions : l’éducation à la santé et au bien-être, le développement culturel et touristique, et la mise en valeur des produits locaux et du terroir. Emmanuel Hervé, le président de l’association créée il y a tout juste un an pour porter le projet, par ailleurs PDG du groupe qui porte son nom, en est devenu le président par conviction. Pour lui, la gastronomie est « un plaisir » bien sûr, et le projet de la cité lui a fourni l’occasion « de donner un peu de mon temps et de mon énergie pour l’activité locale ».

Si jusqu’à la création de l’association la construction d’un bâtiment dédié à proximité du pont Wilson était prévue, les difficultés des collectivités à la financer ont conduit à une réorientation du projet. Aujourd’hui Emmanuel Hervé entend notamment « fédérer l’ensemble des acteurs qui organisent déjà des événements ou des actions sur le territoire et, essayer de favoriser des points de connexion, de rencontres et de mise en commun d’une partie de ce qu’ils font dans le cadre d’un projet plus global, partir des objectifs individuels de chacun pour réaliser des objectifs collectifs ». Bref, ce qu’il met en avant c’est la notion de territoire : « la cité de la gastronomie c’est Tours, la Touraine et le Val de Loire, ce n’est pas un bâtiment », dit-il bien que toutefois, outre La villa, l’association mène une réflexion pour la création d’un second édifice dédié à la valorisation des produits du terroir.

Des valeurs humanistes Un an après sa création l’association compte 120 adhérents. On y trouve par exemple le château de la Bourdaisière qui organise tous les ans un festival de la tomate et abrite un conservatoire national de ce fruit, ou encore celui de Villandry dont les jardins potagers comptent parmi les plus réputés de France et qui mettent en valeur la production et les produits locaux. Ces événements sont appuyés par l’association, ce qui constitue une sorte de labellisation, à condition bien entendu qu’ils soient en phase avec la philosophie du projet. Pour le président de l’association, cette dernière repose en grande partie sur des valeurs, celles que l’on retrouve quand on est assis tous ensemble autour d’une table : « le partage, la relation à autrui, la convivialité, la curiosité des autres, des associations des mets et des saveurs, des valeurs humanistes ».

L’association Tours cité internationale de la gastronomie en Val de Loire a déjà réalisé un tour de chauffe pour mettre ses prétentions en musique. Le 21 janvier, elle a organisé Le grand repas. Ce jour-là, plus de 30 000 couverts ont été dressés autour d’un même menu concocté par Jean Bardet, l’ancien chef du Château de Belmont, deux étoiles au Michelin, aujourd’hui retraité. Tous les restaurants scolaires des collèges du département ont participé à l’opération, quatre maisons de retraite, une dizaine de restaurants, la quasi-totalité des restaurants d’entreprise, tous les chefs élaborant les mêmes recettes en fonction aussi de leur propre budget. Au menu : pâté aux œufs, poule au pots avec ses légumes de saison, Sainte-Maure-de-Touraine et clafoutis pomme-poire. Une seconde édition est d’ores et déjà programmée pour l’automne prochain, à la demande générale.

Le président ne s’étonne pas de cet engouement. « Un événement qui valorise ceux qui font la cuisine et qui ne sont pas de grands chefs, c’est quelque chose extrêmement porteur de sens. Ca va produire une dynamique et des valeurs, peut-être pas tout de suite, mais qui vont s’enraciner en profondeur sur le territoire et in fine, aideront au développement économique et à l’attractivité du territoire. » Quand les autres villes annoncent la création de leur cité à des échéances plus ou moins brèves, le temps nécessaire à l’élaboration du projet et à l’aménagement des locaux, Emmanuel Hervé considère lui, « que la cité est déjà lancée. Elle se construit en avançant, on n’a pas eu besoin d’un bâtiment pour lancer la démarche, pour mettre les acteurs et les citoyen en mouvement, pour qu’ils se l’approprient".

 

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