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Partager l’histoire de la Méditerranée

par Véronique Giraud
Professeur à l’université Mohammed V de Rabat (Maroc), Mostafa Hassani-Idrissi codirige le Manuel commun d'histoire méditerranéenne. DR
Professeur à l’université Mohammed V de Rabat (Maroc), Mostafa Hassani-Idrissi codirige le Manuel commun d'histoire méditerranéenne. DR
Livre Sciences Humaines Publié le 14/06/2014
Premier ouvrage réunissant les points de vue d’historiens qui ont pu travailler en toute indépendance, le manuel « La Méditerranée, une histoire à partager » renouvelle l’approche de l’enseignement de l’histoire. Et met à mal la fermeture et le repli. Mostafa Hassani Idrissi, qui en a dirigé la rédaction, explique comment.

On n’a jamais réuni 15 historiens de huit pays de la Méditerranée pour une œuvre commune. Est-ce efficace ?

L’efficacité se mesure en fonction des objectifs fixés. Deux principaux : la rédaction d’un manuel commun d’histoire méditerranéenne des origines à nos jours et sa mise en œuvre dans la formation des formateurs, la conception des programmes d’histoire et des manuels scolaires d’histoire.

Le premier objectif, scientifique, qui relève de la responsabilité immédiate des auteurs, me semble avoir été atteint, chaque chapitre ayant été écrit par deux auteurs au moins (l’un du Nord et l’autre du Sud), évitant l’ethnocentrisme de l’un ou de l’autre. De même nous avons diversifié la participation géographique des rives méditerranéennes : quatre pays du Nord (Portugal, France, Italie et Grèce) et quatre du Sud (Liban, Egypte, Tunisie et Maroc). Plus encore, des collègues issus de l’Algérie, Mauritanie, Espagne, Israël, Palestine, Turquie, Chypre et même de pays non méditerranéens, Allemagne, Irlande o Royaume-Uni, ont participé aux premières réunions.

Le deuxième objectif, politique, ne relève pas de l’équipe des auteurs mais des dirigeants politiques et de la société civile, qui ont pris acte de ce manuel et l’ont en quelque sorte validé lors de la conférence de lancement qui s’est tenue à Marseille les 2 et 3 décembre 2013. Il reste maintenant à passer aux actes. A savoir : introduire le manuel dans la formation, initiale et continue, des enseignants ; réformer les programmes d’histoire des collèges et lycées pour introduire de façon intégrale les contenus du manuel.

En quoi est-ce une approche nouvelle ?

L’approche est nouvelle car exclusivement scientifique. Elle relève d’une initiative de la société civile, les auteurs ont pu travailler pendant des années en toute indépendance sans ingérence aucune de la part des politiques. En outre, elle s’appuie sur la théorie de la complexité et non celle du choc des civilisations ou de l’essentialisation identitaire. Notre ouvrage est résolument orienté vers l’ouverture et l’échange, la connectivité et le métissage, l’unité et la diversité, la démocratie et la modernité et non pas la fermeture et le repli, la conflictualité et le choc, la division et l’uniformité, l’autoritarisme et le conservatisme… Par le récit, le document et la carte, il vise à informer mais aussi à former, instruire mais également amener à réfléchir. Bref, il offre une histoire construite mais aussi à construire.

Lorsque les points de vue divergeaient trop, comment avez-vous procédé ?

Le choix des auteurs nous a épargné pas mal de divergences, fréquentes dans ce genre de projet. Nos multiples réunions nous ont permis par ailleurs de rapprocher notre vision du projet et l’orientation à lui donner et donc permis de réduire au maximum les divergences. Nous avons eu affaire à deux divergences principales. L’une globale, concernant l’orientation à donner au chapitre médiéval et elle a opposé deux des membres de notre équipe. L’autre, dans certains détails du chapitre contemporain, a opposé un membre de notre équipe à un lecteur extérieur. Dans les deux cas j’ai dû arbitrer après avoir consulté les autres membres de l’équipe. L’arbitrage s’est fait non pas en faveur du Nord ou du Sud mais en faveur des thèses qui correspondent le plus à notre problématique et à l’orientation scientifique de l’ouvrage.

Ce manuel pour les enseignants est le premier pan du projet, d’autres dispositifs l’accompagneront en 2014, pouvez-vous nous en dire plus ?

L’ouvrage est coédité par Bayard et le CNDP. A ce dernier incombe la supervision d’une plateforme qui enrichit le projet de nouveaux contenus directement exploitables par l’enseignant et pendant les formations. Ils sont actuellement accessibles en français et en arabe. Ils seront disponibles dans d’autres langues méditerranéennes au printemps 2014. Des formations des formateurs sont également prévues dans nombre de pays méditerranéens dont le Maroc, la Tunisie, l’Egypte, la Grèce, l’Italie, la France…

 

Bio

Professeur à l’université Mohammed V de Rabat (Maroc), Mostafa Hassani-Idrissi codirige le Manuel commun d'histoire méditerranéenne. Ce projet international ambitieux, issu de la société civile et porté par Marseille-Provence 2013 avec l'aide de la Région PACA, réunit des historiens du Maghreb, d'Europe et du Proche-Orient avec l'ambition de proposer une approche partagée, par delà les clivages culturels et les tentations identitaires. Les 2 et 3 décembre 2013, s’est tenue la conférence de lancement à la Villa Méditerranée de Marseille.

http://cndpval.cndp.fr/mediterranee-une-histoire/accueil/

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