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Ami Barak, le point de vue d’un curateur

par Véronique Giraud
Ami Barak, curateur du Salon de Montrouge 2016 . DR
Ami Barak, curateur du Salon de Montrouge 2016 . DR
Arts visuels Arts plastiques Publié le 08/05/2016
Ami Barak, commissaire artistique de la 61ème édition du Salon de Montrouge, n'a pas voulu révolutionner la manifestation mais apporte un nouveau sens à la déambulation entre les œuvres.

Quels changements avez-vous apportés au Salon de Montrouge ?

Mon grain de sel fut ce que j’appelle « un parti pris curatorial ». C’est mon profil et mon savoir-faire. À la place du principe initial, qui était de présenter les artistes sous forme de stand, j’ai proposé qu’on bâtisse une exposition de groupes où les œuvres peuvent dialoguer davantage, s’entremêler, où le parcours est un peu plus labyrinthique. J’aime l’idée de se promener et de découvrir. Le principe de l’exposition permet de se rendre compte de liens entre ce que j’appelle un profil générationnel. Des accointances, des proximités, des dénominateurs communs, une sorte de fil rouge tissé entre différentes démarches. C’est ce que nous avons fait.

 

Ce fil rouge est venu après la sélection des artistes ?

Le processus de sélection des artistes n’a pas changé, nous avons simplement réduit le nombre des membres du comité de sélection car plus on est nombreux, plus il y a de tensions. Nous sommes passés de 16 à 6 membres. Après appel à candidatures, pour lequel nous avons eu plus de 2800 dossiers, nous avons fait une première sélection de 280 dossiers que nous avons soumis au jury qui en a choisi 60. Une fois ces 60 choisis, a commencé mon travail et celui de Marie, mon amie et collaboratrice. Nous avons associé deux scénographes et une jeune graphiste.

 

Quelles sont les valeurs défendues par le salon ?

La valeur générique est restée la même. C’est une plateforme pour la scène émergente, une tribune offerte à des artistes, jeunes ou moins jeunes, au démarrage de leur carrière, à qui on offre un événement qui est censé les confirmer, les affirmer.

Le salon s’est assuré ces dernières années une forte réputation, cela déteint. Pour un jeune artiste, faire partie du salon c’est un gage de reconnaissance, cela montre qu’il a du talent, qu’il a été choisi par des professionnels pour son travail et sa personnalité affirmée. Ce sont les valeurs du salon. En même temps, c’est un moment dans l’année où on fait des découvertes. C’est l’occasion de voir qu’une nouvelle génération arrive avec des noms, des démarches, crée l’actualité.

 

Comment sélectionnez-vous les œuvres ?

Une fois les artistes choisis, on leur demande de nous proposer des œuvres et des projets. On fait à nouveau un tri parmi tout ce qu’ils nous proposent, en fonction du lieu, de l’emprise au sol, d’un jugement de valeur par rapport à ce que nous inspire l’artiste, puis on choisit l’œuvre qui nous semble la plus représentative de son travail. En outre on peut la cuisiner, on met nos ingrédients et on présente un joli plat.

 

Quel objectif guide ce travail d’accompagnement ?

Convaincre. Je voudrais que tous ceux qui vont voir l’œuvre se disent c’est intéressant, c’est fort, c’est poignant, ça me parle.

 

Beaucoup d’œuvres sont conceptuelles…

Il y a toujours du cerveau dans ce que fait un artiste.

 

Pourquoi conduire ces œuvres par un parcours thématique ?

Je ne les conduis pas. J’essaie de partager le fait que j’ai mis mon nez dans leur travail et que j’ai saisi des thèmes. C’est une sorte de réponse à tous ceux qui pensent : mais qu’est-ce qu’ils ont à dire, qu’est-ce qu’ils font ces gens-là, qu’est ce qui les intéresse, les obsède. J’ai pris mon feutre et j’ai tiré quelques traits de couleurs. Nous avons chapitré, en cinq.

Les artistes sont nombreux, soixante, avec environ 150 pièces à ordonner afin que la déambulation soit aisée. Il y a beaucoup d’installations.

 

Vous avez une grande expérience des artistes, avez-vous été surpris par ce que vous avez vu ?

Disons que j’ai été agréablement surpris. J’ai fait des découvertes, j’ai apprécié plusieurs projets, d’artistes aux personnalités touchantes. On sent que certains vont aller loin. C’est très beau. Une multiplicité d’approches et de démarches. Etre artiste, ce n’est pas une question d’âge, c’est une signature. Quelque chose les singularise, leur est propre, que je peux pointer sur leur travail. C’est la chose la plus importante. Tant qu’on fait des choses difficilement repérables, on ne sort pas du lot.

 

Qu’est ce qui détermine le succès du salon pour vous ? Est-ce le nombre de visiteurs ?

Non, c’est la qualité des œuvres exposées. J’ai envie d’entendre j’aime ceci ou je n’aime pas cela. Tout le monde n’a pas le même intérêt. Je vais écouter, je vais apprendre aussi.

 

Vos coups de cœur ?

Je trouve intéressant le travail d’Anne Le Troter dont l’installation interroge sur le traitement des souvenirs, des histoires personnelles transformé dans une sculpture non conventionnelle mêlée à des images. J’aime beaucoup Charlotte El Boussaed avec ses photos et vidéos sur la cuisine intergénérationnelle. Egalement Rémi Amiot qui fait un travail, à travers le papier, sur la perception de ce qui est invisible, sur la façon de donner une image à la respiration. Le dessin extraordinaire de Rémi Brière pour son store californien. Keita Mori, un artiste japonais qui a réalisé un travail incroyable avec du fil cousu à la place du crayon, d’une grande sophistication. Paul Vergier, Yassine Boussaadoun.

 

 

Ancien directeur du Frac Languedoc-Roussillon, président de IKT (International Association of Contemporary Art Curators), directeur artistique de la Nuit Blanche en 2003 et 2004, Ami Barak a organisé de nombreuses expositions emblématiques en France et à l’étranger.

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