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Gülsun Karamustafa, rétrospective à Berlin

par Véronique Giraud
Panther Stool, 2007 © Vehbi Koç Foundation Contemporary Art Collection, Istanbul ©Giraud/NAJA
Panther Stool, 2007 © Vehbi Koç Foundation Contemporary Art Collection, Istanbul ©Giraud/NAJA
Double Action Series for Oriental Fantasies, 2000 © Giraud/NAJA
Double Action Series for Oriental Fantasies, 2000 © Giraud/NAJA
Arts visuels Installation Publié le 15/09/2016
Gülsun Karamustafa est l'une des artistes les plus célèbres de Turquie. Pour se frotter à son univers, mêlant souvenirs personnels et histoire politique, il faut se rendre à Berlin, où la Hamburger Bahnhof lui consacre une belle rétrospective.

Si vous en êtes resté au sensuel exotisme de l'orientalisme, l'exposition que le musée d'art contemporain de Berlin consacre à Gülsun Karamustafa devrait vous surprendre. Née en 1946 à Ankara, cette artiste a connu la République démocratique et laïque d’Attaturk et vit dans celle, islamiste, conduite par Erdogan. Depuis longtemps, elle explore de ses créations les problématiques socio-politiques dans la Turquie moderne. Tour à tour cinéaste, peintre, sculpteur, elle ouvre grand les yeux sur son pays. Lorsqu'elle filme les femmes, elles se racontent de l'intérieur. Lorsqu'elle installe ses cahiers d'écolière, resurgit la référence à l'armée, longtemps la classe dominante de la société turque. Lorsqu'elle dispose en un cercle des ouvertures de magazines des années 50 où figurent des actrices et chanteuses turques au look traditionnel ou occidental, le lien entre Orient et Occident est implicite. Lorsqu'elle peint des femmes portant un numéro, elle rappelle sa terrible expérience de la prison en 1971 et donne un visage à ses compagnes de cellule. Elle a même reconstitué en maquette sa maison, construite à l'origine par l'une des nombreuses familles grecques d'Istanbul, chassées du pays par le pogrom de 1955, contraintes d'abandonner leurs biens. 50 ans plus tard, l'artiste a tenu à retrouver cette famille, renouant le lien avec une des minorités opprimées. Autant de récits qui réveillent des moments de l'histoire récente de la Turquie, souvent tue.

 

Du récit intime à l'histoire collective. Chaque œuvre de Gülsun Karamustafa exerce avec malice et une naïveté trompeuse la critique d'une relation sociale qui étouffe bien des libertés et fait surgir bien des haines. Avec un écho familier aux sociétés occidentales. Une installation d'hommes dont les bouches sont baillonnées par un large trait rouge pose habilement la question de la liberté d'expression. Un mannequin homme habillé d'une robe pose celle du genre. En filigrane de ses tableaux, le poids de la société, de la religion, la figure de l'homme, celle de la femme. Son installation Mystic transport, composée de corbeilles en métal dans  lesquelles se trouve une couverture, évoque avec des moyens très simples la mobilité, le déplacement. Autant de thèmes au cœur des questionnements actuels et des revendications d'une partie de nos sociétés. Une démonstration propre à l'artiste permettant de mettre la Turquie, malgré elle, au cœur de la modernité.

 

Chronographia, rétrospective de Gülsun Karamustafa, du 10 juin au 23 octobre 2016, Hamburger Banhof, Invalidenstraße 50-51, Berlin.

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