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« Où en êtes-vous, Jafar Panahi ? » Rétrospective d’un insoumis

par Véronique Giraud
Cinéma Film Publié le 12/10/2016
Le Centre Pompidou présente une rétrospective intégrale de l’œuvre de Jafar Panahi, le cinéaste phare de la « nouvelle vague » iranienne. Interdit par le régime iranien de filmer pendant vingt ans, l'insoumis a, depuis sa condamnation en 2011, réalisé cinq films. Prouvant qu’il peut faire du cinéma dans un pays où on l’empêche d’en faire. Le musée lui a commandé un dernier court métrage. Une exclusivité !

Le réalisateur iranien Jafar Panahi a été condamné en 2001 à six ans de prison assortis d’une interdiction de filmer de vingt ans. Il lui est également interdit de voyager hors de son pays. Cette censure politique n’empêche pas le cinéaste de filmer clandestinement. Privé de tourner dans les rues, de filmer des gens, il tourne là où il n’est pas nécessaire de demander une autorisation. Son dernier film, Taxi Téhéran, il l’a réalisé en 2015 au volant de sa voiture. Récompensé par l’Ours d’or, le long métrage connaît un très grand succès critique et public. Depuis, il a réalisé plusieurs films avec des moyens très limités, ayant recours à la ruse et au système D. Privé de filmer la société contemporaine, il se filme souvent lui-même, chez lui ou dans ses déplacements dans son pays. Le centre Pompidou, qui a entrepris de présenter la rétrospective intégrale de son œuvre, dont cinq films inédits en France, lui a passé commande d’un film. Le court métrage Où en êtes-vous, Jafar Panahi ? est projeté pour la première fois et en exclusivité au niveau -1 du Musée d’art moderne.

Pour ce court-métrage, le procédé est de nouveau le tournage en voiture. Cette fois, la caméra n’est pas fixée sur le pare-brise, elle est entre les mains d'un ami réalisateur, venu présenter un film au festival de Téhéran. Film pour lequel les organisateurs lui ont demandé de retirer au générique le nom de Jafar Panahi, finalement retiré du festival. Jafar Panahi lui parle, décrit le quotidien d'un cinéaste privé de la liberté de son travail, répond à quelques appels sur son portable, qui témoignent que ceux qui s’intéressent à son œuvre ne l’ont pas oublié et lui vouent toujours leur admiration. Il se fait discret mais est toujours sollicité par les étudiants de l’école de cinéma pour un avis sur un scénario, sur un montage… Quand il accepte, il recommande la plus grande discrétion sur cette collaboration pour ne pas nuire à leur carrière. On est ému de l’entendre dire : « Avant mon arrestation, les étudiants venaient me voir pour se plaindre des conditions difficiles pour faire un film en Iran, je les rassurai. Aujourd’hui personne ne se plaint, les étudiants se disent : pour lui c’est interdit et il y arrive quand même. Je crois que je leur ai montré qu’on peut faire un film même avec rien. » Il est aussi question de l'amitié qui l’unissait à Abbas Kiarostami, dont il fut l’assistant à ses débuts. C’est d’ailleurs sur la route qui mène au cimetière où vient d’être enterré le cinéaste que le film est tourné.

 

La photographie comme un exutoire. En 2014, Jafar Panahi s’est tourné vers la photographie. Privé de filmer la rue et la vie en Iran, il a ouvert sa fenêtre, levé les yeux et capté le ciel dans son objectif. « Pendant deux ans j’ai fait des photos de nuages. J’en ai choisi 14, pour faire une exposition à Téhéran. Malheureusement, ils ont interdit l’impression, ce jour-là ! Je suis donc obligé de faire cette exposition hors d’Iran... » explique-t-il. C’est donc la première fois que son travail est exposé. Et ces images vont intégrer les collections du Centre Pompidou, qui a fait l’acquisition de dix-neuf photographies de la série Images/Nuages.

 

Jafar Panahi, Rétrospective intégrale et exposition photographique du vendredi 7 octobre au dimanche 13 novembre. Cinémas 1 et 2, petit salle et Forum -1.

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