espace abonné Mot de passe oublié ?

Vous n'avez pas de compte ? Enregistrez-vous

Mot de passe oublié ?
ACCUEIL > Événement > 400 artistes en colère

400 artistes en colère

par Clémence Bohême
A l'appel du Syndeac, plus de 400 artistes réunis au Théâtre de la Colline lançaient un carton rouge à la ministre de la culture le 10 décembre. © Bohême/NAJA
A l'appel du Syndeac, plus de 400 artistes réunis au Théâtre de la Colline lançaient un carton rouge à la ministre de la culture le 10 décembre. © Bohême/NAJA
Hors-Champs Croisement Publié le 10/12/2014
Budgets en baisse, régime des intermittents en péril, la colère ne cesse de monter dans le monde de la culture. Quelques 400 artistes, femmes et hommes, techniciens, directeurs de théâtre et comédiens ont répondu à « l’appel du 10 décembre » lancé par le Syndeac et se sont réunis au Théâtre de la Colline.

« Semaine après semaine, nous voyons grandir la menace de l’effondrement de tout ce qui a constitué la politique de décentralisation du spectacle vivant dans notre pays depuis 50 ans. C’est-à-dire depuis qu’elle fut rêvée par le Conseil National de la Résistance. » C’est ainsi que commence la lettre ouverte lue par l’actrice Clothilde Hesme et adressée à Fleur Pellerin, ministre de la culture. En ces mots, sur la scène du Théâtre de la Colline, l’actrice portait la voix de quelques 400 artistes, qui, l’air grave, se sont associés à cet "appel du 10 décembre", organisé par le Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac). Dans la liste des signataires de cette lettre, Mathieu Amalric, Emmanuelle Béart, des comédiens, mais aussi directeurs de théâtre, plasticiens, techniciens, chorégraphes, metteurs en scène... Tous ont manifesté leur mécontentement face aux budgets qui s’effondrent, emportant compagnies, artistes débutants ou confirmés, et même théâtres municipaux. Parmi la quinzaine d'artistes sur scène, il y avait Jean-Pierre Vincent, metteur en scène et directeur de compagnie : « la première motivation, on pourra dire tout ce qu’on veut, c’est d’abord une histoire de pognon. Les moyens de la liberté du travail des artistes s’écroulent petit à petit. Et cette année de façon absolument décisive. »

L’exception culturelle en péril

Décisive aussi, la suppression de la subvention du Forum du Blanc-Mesnil par Thierry Meignen, nouveau maire UMP de la ville. La cause ? Une programmation « trop élitiste » selon ses mots. Les histoires d’argent, Xavier Croci, directeur de ce théâtre municipal de Seine-Saint-Denis, en sait quelque chose. 80% de sa structure étaient financés par la ville. Alors si cette décision de la municipalité est appliquée, c'est tout simplement Le Forum qui fermera ses portes en 2015, faisant ses adieux à 14 ans de bons et loyaux services envers la culture, la création. En 2008, 150 artistes s'étaient déjà donnés rendez-vous au Théâtre de l'Odéon devant la révision des budgets du gouvernement Fillon. Depuis tout ce temps, la diminution de la culture subventionnée pose la question du rôle de chacun : élus et citoyens. « Nous ne nous plaignons pas, nous portons plainte », précise Arnaud Meunier, metteur en scène et directeur de La Comédie à Saint-Etienne. Reconnaissant toutefois que « nul part ailleurs qu’en France, on trouve un tel réseau de théâtres et structures culturelles. » Du bancable, de la consommation culturelle, voire de l’anti-intellectualisme, des méthodes d’évaluation des subventions « ordonnées par une idéologie du profit commercial » dénoncent les artistes venus sur scène. « Une crise financière qui pousse nos dirigeants à juger chaque projet à son coût plutôt qu’à son sens » lançait Clothilde Hesme à la lecture de la lettre. Par-dessus tout, il y a « l’habituelle farce » selon Jean-Pierre Vincent, du gel de 8% des crédits d’intervention du ministère de la culture alors que l’Etat s’était engagé à stabiliser le budget sur trois ans.

« Pas de culture, sans artistes »

La mission de concertation portant sur les annexes 8 (techniciens) & 10 (artistes) de la convention de l’UNEDIC devrait rendre les propositions dans les jours qui viennent. Tout le monde sera bien curieux de les entendre. « Nous sommes aussi dans un héritage des années 1980, où la politique a soutenu la formation des artistes qui maintenant doivent faire face à un marché bouché », explique Matthieu Edet, administrateur et producteur de compagnies indépendantes qui peinent à faire leur trou dans le métier. « Car en réalité, il y a plus d’artistes que de scènes.» L’intermittence s’est peu à peu ouverte « à des professions qui n’ont rien à faire dans ce régime spécial, comme l’audiovisuel », complète Jean-Pierre Vincent. Dans cette réunion d’artistes, les revendications sont nombreuses. Les solutions ne viennent pas. Les budgets et la réforme territoriale sont pointés du doigt, mais rompre l’alliance avec le gouvernement ou les collectivités qui, bien souvent, financent aux trois quarts la culture, est impossible reconnaissent les artistes. Alors, sans moyens, il faut user d’ingéniosité, de solidarité. A l’image d’Emmanuelle Vo Dinh, chorégraphe et directrice du centre chorégraphique national Le Phare au Havre qui diffuse ses créations auprès de ses partenaires CCN. Un début de réflexion s’organise au sein du comité national du Syndeac qui ne compte pas mollir. « Ce soir, c’est une nouvelle séquence qui commence, notre force est intacte », scande la présidente du Syndeac, Madeleine Louarn.

Partager sur
à lire aussi

La danse, "parent pauvre de la culture", avec Emmanuelle Vo-Dinh Appel du 10 décembre : Madeleine Louarn Appel du 10 décembre : l'exemple du Forum du Banc-Mesnil avec Xavier Croci Appel du 10 décembre : Jean-Pierre Vincent veut raviver le débat      
Appel du 10 décembre, théâtre de la colline
Fermer