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Les Plateaux Sauvages, théâtre de fabrique et de partage

par Véronique Giraud
L'accueil des Plateaux Sauvages, le lieu culturel du quartier des Amandiers. © piknetart
L'accueil des Plateaux Sauvages, le lieu culturel du quartier des Amandiers. © piknetart
Le 28 janvier 2017, les gens du quartier de la Banane ont répondu nombreux à l'invitation des Plateaux Sauvages. © Baptiste Muzard
Le 28 janvier 2017, les gens du quartier de la Banane ont répondu nombreux à l'invitation des Plateaux Sauvages. © Baptiste Muzard
Les plateaux sauvages, lieu de création et de répétition des artistes émergents. © Baptiste Muzard
Les plateaux sauvages, lieu de création et de répétition des artistes émergents. © Baptiste Muzard
Arts vivants Théâtre Publié le 20/03/2017
Un nouveau lieu culturel où les artistes et les gens du quartier de "La Banane" sont les bienvenus sollicite attention et bienveillance. Baptisé Les Plateaux Sauvages, il a ouvert ses ateliers et ses gradins sur un projet porté par la comédienne et metteure en scène Laetitia Guédon, bien décidée à entremêler création et action culturelle pour faire rayonner le territoire.

À Paris, dans le quartier des Amandiers, que les jeunes ont rebaptisé "La Banane", les habitués du Théâtre des Plateaux ont vu leur salle fermer. Mais en octobre 2016, la porte d’à côté a rouvert, introduite par un grand logo tout neuf : Les Plateaux Sauvages. Un joli nom, respirant l’épopée et le grand large, qui reflète la nouvelle identité d’un immense espace où se côtoyaient jusque-là un centre d’animation et un théâtre. L’entrée, désormais unique, se fait rue des Plâtrières. Elle ouvre sur un grand hall immaculé, fraîchement rénové, où on peut se renseigner, boire un verre, ou rester un moment pour humer le parfum du spectacle vivant. Joli nom celui-là aussi.

Celle qui dirige le lieu, souriante et pétillante de vie, est la jeune metteure en scène et comédienne Laetitia Guédon. Elle a su convaincre que son projet était le bon pour donner vie à cet établissement de la Ville de Paris. « Je l’ai imaginé en me souvenant de quoi j’ai manqué en tant que compagnie émergente dans ma phase de création de projet », exprime-t-elle avant d'enchaîner les multiples actions qu'elle entend mener dans ce lieu dont elle a la charge. Le postulat de départ tient en deux points : d'une part l’accompagnement à la création de compagnies, à travers un accueil en résidences, de l'autre l’accompagnement en technique. « Nous avons ici un directeur technique et un régisseur général, et nous avons fait le choix de ne pas avoir d’équipe technique permanente, de faire appel à un vivier de techniciens qui sont plutôt intermittents du spectacle et qu’on peut mettre à disposition des compagnies pour du son, de la lumière, mais aussi des créateurs, scénographes, vidéastes, costumiers, etc. ». Les compagnies peuvent donc être accueillies en résidence uniquement pour leur lumière, l’audio, la vidéo… À terme, un atelier de costumier partagé et un atelier de construction pour les décors viendront compléter l’offre. « Quand on a vingt ans, à la sortie de l’école, on n’a pas forcément un réseau de techniciens ».

Un dispositif d’accompagnement basé sur le partage. « Je me suis dit aussi : on demande aux artistes d’être créateurs de formes nouvelles mais aussi chargés de production, administrateurs, etc. », explique Laetitia Guédon, qui a fait le choix d’implanter dans le lieu des bureaux de production, de diffusion, d’administration, tous aguerris à l’accompagnement de compagnies émergentes, et indépendants de l’équipe permanente des Plateaux sauvages. Copilote, structure de développement de projets artistiques fondée par Juliette Medelli et Léa Serror, sera accueillie à la rentrée prochaine. « Elles sont logées gratuitement dans des bureaux à l’étage. En échange, elles s’engagent à accompagner les 14 compagnies en résidence au cours de la saison prochaine, sur des modules particuliers, de diffusion, communication, administration ou autre, selon les besoins de compagnies. L’objectif est de les faire monter en compétences. » Deux critères d’accueil des jeunes compagnies : d’une part, seuls les projets de créations, les spectacles qui n’ont jamais été vus auparavant, sont sélectionnés. D’autre part, elles sont choisies pour leur capacité à partager leur processus de création avec le territoire. « Le territoire des Amandiers a une grande mixité et une grande richesse associative, culturelle et sociale, » se réjouit la directrice.

Une action culturelle nouvelle génération. « L’action culturelle m’a toujours posé problème. On a l’impression que nous les artistes plein de savoir, nous allons élever les masses populaires vers la culture. Ici, l’idée est de proposer aux artistes de faire un pas de côté dans leur création en venant partager votre processus avec une école, un collège, un lycée, un foyer de jeunes travailleurs, un foyer de migrants ». Il s’agit d’une action qui infuse sur le territoire. Les artistes sont accompagnés dans le financement et le montage de ces projets, qui donnent ensuite lieu à une restitution en avant-première des spectacles : ouverture de travail, exposition de photos, installation dans la ville, par exemple. La famille et les proches des enfants qui ont eu ce moment de partage avec un artiste sont le premier public.

Un immense chantier. La première tranche de travaux s’est achevée en janvier, les travaux reprendront de juin à l’automne 2017, avec la pose d’un ascenseur. Mais, pour la directrice, il était important de faire vivre le lieu dès septembre 2016. Les premières compagnies ont été accueillies en résidence : celles des Lucioles et de Blondine Savetier, celle de Laetitia Guédon pour son spectacle Samo, a Tribute to Basquiat, le jeune auteur Sydney Ali Mehelleb y a répété une pièce, présentée au Théâtre 13 en début d’année. Il y eut aussi Les Chiens de Navarre, et bientôt le Birgit Ensemble de Julie Bertin et Jade Herbulot.

Un double projet artistique. Tous les artistes en résidence aux Plateaux Sauvages sont prévenus : ils doivent venir avec un double projet, celui de leur création et celui à partager avec le territoire. Les premières expériences ont eu lieu. Deux artistes de la compagnie des Lucioles ont porté un projet d’interview dans le quartier qui a donné lieu à un documentaire intitulé Let’s go ; avec le collège Robert Doisneau, Laetitia Guédon mène elle un travail autour de l’identité ; Blandine Savetier a ouvert ses répétitions et va organiser un stage avec des élèves du conservatoire Georges Bizet autour de son travail d’adaptation d’un texte d’Oran Pamuk, qu’elle a réalisé pour la scène ; la Cie des Chiens de Navarre a travaillé avec des étudiants de l’université Paris III ; Lou Wenzel, actuellement en résidence sur un texte de Max Guéric, mène un atelier d'initiation théâtrale avec des élèves de CM1-CM2 de l’école des Amandiers, sur un texte, intitulé L’imparfait, écrit par son metteur en scène Olivier Balazuc.

Un lieu de vie. Et il y a déjà des ateliers de pratique amateur. L’an prochain, une  quarantaine auront lieu le soir. On peut y faire du théâtre, de la danse, de la musique, mais aussi s’initer au bien-être, au yoga, au pilate, à la culture pop japonaise, à l’écriture, etc. Des associations y donneront aussi des cours d’alphabétisation, d’aide aux devoirs. Ouverts à tous les publics et à tarification sociale. Un bar sera dédié à des jeunes chefs et des mamans. Actuellement, La gamelle du chef, une association du quartier, réalise tous les buffets. Le 28 janvier dernier, pour la grande journée d’ouverture, 1100 spectateurs sont venus du quartier, ont découvert des bouchées de toutes les cuisines du monde. A l’horizon 2018, il y aura un bar où s’exprimeront de jeunes chefs. « Mon envie c’est aussi offrir un lieu au carrefour de la librairie et de la bibliothèque, où on peut acheter, emprunter, ou lire un livre. » Les envies et les projets ne manquent pas dans ce lieu où tout paraît possible.

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