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Mot de passe oublié ?Que les travaux des artistes qu’il admire ne soient pas plus connus a conduit Frédéric Pajak à créer Les Cahiers dessinés. Ses ouvrages font découvrir depuis des années les dessinateurs et les illustrateurs, redécouvrir aussi les oubliés. Une motivation que reflète l’exposition Grand Trouble à la Halle Saint-Pierre. On y retrouve les amis de l’éditeur, nombreux. Certains ont disparu, d’autres sont inconnus en France, à l’instar du sculpteur suisse Olivier Estoppey, dont les trois loups en béton coulé donnent le frisson. Ou encore de François Aubrun, qu’il regrette de n’avoir jamais rencontré, mais dont il est depuis longtemps amoureux des peintures, et pour lequel il prépare un livre. On sera étonné du travail géométrique et miniature d’Ode Bertrand, dont chaque tache de couleur provient de l'application d’un tube de gouache, dérangé par la force des aquarelles de Tochkovitch, amusé par les facétieuses sculptures imbriquées de Pavel Schmidt.
Les mouvements dessinés. Parmi les amis, Philippe Becquelin, dit Mix et remix, a beaucoup compté. Pour Frédéric Pajak, le talent du dessinateur n’a pas été suffisamment reconnu de son vivant (il est décédé en 2016 à 58 ans). Ses dessins d’humour, relayés par la presse internationale, sont là, et font sourire. Ses derniers dessins aussi, il les avait réalisés dans un carnet alors qu’il était très malade. Pour ceux-là, écrit Pajak : « L’humoriste a fait place à l’artiste. Célébrités, mythes, paysages ou mœurs : tout était prétexte à sa fantaisie spontanée. Son inspiration nous surprend et nous émeut. » Toutes les œuvres présentées, dessins, peintures, sculptures, photographies, installations, sont à la hauteur d’une telle amitié. Comme celle qui le lie au chercheur Matthieu Gonelle, auteur de deux monographies sur les météorites, et dont quelques pierres tombées du ciel qu'il a découvertes voisinent ici avec d'autres pierres dans une vitrine intrigante. La délicatesse des dessins et peintures laisse planer une grande douceur et éblouit souvent par sa finesse. Le dessin suit les vagues à l’âme des artistes, dont la sensibilité est perceptible à fleur de papier. Il peut être satirique, comme en témoigne depuis longtemps Tomi Ungerer, dont deux œuvres récentes font belle figure. Frédéric Pajak découvre lui-même certains artistes de l'exposition, ce sont ceux que ses amis ont invités. Le cercle trouble grandit sans cesse.
Itinéraire d'un artiste amoureux du dessin. Né dans une famille d’artistes - il est le fils du peintre Jacques Pajak -, Frédéric Pajak a étudié très jeune la gravure, le dessin, la peinture… Et n’a jamais quitté la sphère artistique. Sa famille, ses proches sont des artistes. De ses études aux Beaux-Arts, de sa direction des revues culturelles et satiriques Voir et L’imbécile, il a gardé des amis. De ses rencontres, voyages et visites d’atelier pour Les Cahiers dessinés, collection dont il est le fondateur, il a noué de fidèles amitiés, suscitées par une admiration mutuelle. Quand on discute avec lui, cela semble aller de soi. Il n’a qu’un regret : que le dessin n’ait pas la place qu’il devrait avoir. Il observe malgré tout un regain d’attention vers le papier, c’est sans doute ce qui l’encourage à se tourner davantage vers la peinture et la sculpture. Défendre un art et des idées forge un caractère.
Exposition Grand Trouble, du 9 mai au 30 juillet 2017 à la Halle Saint-Pierre, 2, rue Ronsard – 75018 Paris.