espace abonné Mot de passe oublié ?

Vous n'avez pas de compte ? Enregistrez-vous

Mot de passe oublié ?
ACCUEIL > Événement > Avignon : La danse toujours plus présente

Avignon : La danse toujours plus présente

par Julie Matas
"Fiesta", création d'Israel Galvan dans la Cour d'honneur © Aleksandra Kononchenko
Arts vivants Danse Publié le 05/07/2017
Multiples créations africaines, du Mali, du Burkina-Fasso, de Côte d’Ivoire, interrogations sur la mer entre la France et la Tunisie, plongée dans le geste quotidien, les chorégraphies sont diverses pour la 71e édition du Festival d'Avignon.

Les chorégraphes sont présents à Avignon depuis que Jean Vilar a invité Maurice Béjart et son ballet du XXe siècle en 1966 dans la Cour d’honneur. Une parenté des arts vivants que les croisements et mélanges des genres, propres à notre siècle, ne font qu’amplifier. Huit créations en France de chorégraphies sont au programme du festival cette année et de nombreuses pièces de théâtre font appel à la danse, tant les arts s'entre-mêlent.

Comme toujours, le deuxième spectacle programmé dans la Cour d’honneur est une chorégraphie. Contemporaine bien entendu, même si le sévillan Israel Galvan est un maître du flamenco. Danse populaire, le flamenco est vieux d’au moins trois siècles, époque où on voit apparaître en Andalousie cet art, mélange de tant de cultures qui ont peuplé la région d'Espagne. Danse que l’on pratique en solo, chaque danseur et danseuse prenant son tour, le flamenco s’est confronté à la fin du XXe siècle à la chorégraphie contemporaine, notamment avec Antonio Gades qui y fit entrer les formations en ballet.

 

La fête avec Galvan. Israel Galvan ne cesse de revisiter le flamenco d’une façon magistrale, envoûtant les salles. Il y a deux ans, à Montpellier Danse, il a même osé monter une pièce avec Akram Kahn, un chorégraphe qui joue entre tradition et transgression. Danse traditionnelle indienne et danse flamenco se sont alors affrontées jusqu’à devenir complices d’une créativité impressionnante.

Cette année, l'impressionnante Cour d’honneur lui est offerte, du 16 au 23 juillet. Il a fait le choix d’une Fiesta comme on sait les faire à Séville. « Je crois que la fête est à la fois l’expression et la nécessité de ma culture » dit le chorégraphe qui sait ce que l’Espagne populaire, et notamment rurale, porte de fêtes, de processions, de carnavals, de férias. Avec des danseurs et des musiciens issus d'un monde mixte, flamenco ou autre, il entend aussi aborder les fêtes de famille, les fêtes intimes, celles qui « laissent apparaître une certaine violence, un certain érotisme dans une sorte de libération générale ».

 

Le geste quotidien. La danse, c’est avant tout une façon de se mouvoir dans un espace. L’étude du geste est donc essentielle. Sous toutes ses formes. Et ce sont précisément les gestes du quotidien qui intéressent particulièrement la chorégraphe et performeuse italienne Ambra Senatore. Elle y décèle l’idée de porosité entre la réalité et la fiction, entre l’acteur qui danse et celui qui joue un personnage qui danse. Pour Scena Madre présentée du 7 au 13 juillet, les danseurs sont réunis autour de la résolution d’une énigme, personnifiée par des scènes quasi d’actualité, la vie d’une rue, un naufrage, un repas dans une cantine d’entreprise… Des scènes dont on ne sait jamais où elles finissent, où elles commencent à l’image des frontières impossibles d’un art que le texte ne peut poser.

 

Créations africaines. A l’image de cette 71e édition, le théâtre Benoît XII accueille un spectacle en trois moments de danses venues d’Afrique. Du 9 au 15 juillet, trois pièces qui ont reçu le Prix découverte RFI des rencontres chorégraphiques de l’Afrique et de l’Océan indien, sont présentées à la suite dans un spectacle court. Elles montrent à la fois la diversité et la création d’un continent où depuis 30 ans se multiplient les initiatives de jeunes créateurs.

Kettly Noël, haïtienne installée à Bamako, dirige le festival de danse contemporaine de la capitale malienne où elle tient également le centre culturel Donko Seko où la danse apparaît comme un outil de socialisation. Elle mettra en scène dans Tichèlbé une danseuse, Ibrahima Camara, et un danseur, Oumaïna Manaï pour une attraction-répulsion d’un couple en rapprochement. Avec Sans repères, les ivoiriennes Nadia Beugré et Nina Kippré, qui ont toutes deux étudié les danses traditionnelles, reprennent une pièce de Béatrice Kombé avec laquelle la première a créé la compagnie Tché-Tché. Cette pièce est un hommage à la chorégraphe engagée qu’était Béatrice Kombé décédée en 2007. Les burkinabais Seydou Boro et Salia Sanou sont bien connus du public montpelliérain pour avoir dansé dans la compagnie de Mathilde Monnier avant de se lancer dans leurs propres chorégraphies. Les deux chorégraphes ont fondé ensemble la Termitière, un centre de développement chorégraphique à Ouagadougou et présentent Figninto – L’œil troué où les fondamentaux de l’humanité sont mis à mal par l’urgence du temps moderne.

 

Face à la mer. C’est au Cloître des Carmes du 20 au 25 juillet que Radhouane El Meddeb présentera sa dernière création Face à la mer pour que les larmes deviennent des éclats de rire. Formé à l’institut supérieur d’art dramatique de Tunis, le chorégraphe se fait connaître en France avec son solo Pour en finir avec MOI, en 2005. Il signe son passage à la danse après s’être principalament produit comme acteur de théâtre. Artiste associé au « 104 » à Paris en 2011, il multiplie les créations et vient cette année interroger sa double culture dans une pièce pour huit danseurs, un chanteur et un pianiste. La mer, être face à la mer, c’est ce que font les danseurs face au public, la mer qui sépare les deux cultures du chorégraphe, son attachement au printemps arabe et à l’autre pays, de l’autre côté.

 

Danse pour jeune public. Le chorégraphe et théoricien hongrois Rudolf Laban est peu connu du public. Il a pourtant créé une écriture originale pour la danse. Son travail a porté sur le mouvement et la notation chorégraphique. L’aspect le plus important est la cinétographie, ou manière de noter le mouvement en danse, qu’il a codifiée en 1928. Ce travail passionne depuis longtemps Raphaël Cottin, au point qu’il a décidé d’initier le jeune public dans une pièce en six chapitres intitulée C’est une légende. Présentée du 23 au 26 juillet au CDC-Les Hivernales, sa courte pièce parcourra l’histoire de la danse de l’académisme du Grand siècle aux œuvres de Pina Bausch. On y croisera bien entendu les grands chorégraphes qui ont fait la danse contemporaine, Isadora Duncan et Alwin Nikolaïs aux premières places.

 

Kinshasa et Bamako. Le groupe de musique Basokin sera dans la cour du Collège Vernet pour deux représentations le 16 juillet (à 17h et à 20h) avec sa troupe de danseuses aux corps recouverts de marques blanches. Jouant une musique aux sons des guitares distordues, des tambours traditionnels, des micros saturés, des chanteurs donnant à la fois la puissance électrique et fiévreuse de l’immense ville de Kinshasa et l’immensité d’une culture trop mêlée, trop diverse, trop ancienne, pour ne pas être fabuleuse. Basokin est un groupe qui compte au Congo.

La chanteuse Rokia Traoré est une icône de la world music. Elle sera au festival d’Avignon pour présenter Dream Mandé Djata spectacle inspiré de l’épopée du roi Soundiata Keïta qui, au XIIIe siècle, vainquit le fourbe roi Kanté et unifie l’empire du Mandé. Des scènes jouées où l’art des griots, transmettant « l’information » de bouche à oreille à la cour du roi, est entrecoupé de musiques et de chants.

 

Festival international d’Avignon. 71e édition du 6 au 26 juillet.

Partager sur
Fermer