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Seize statues « dégénérées » exposées en Allemagne

par Jacques Moulins
Une
Une "Danseuse" de Marg Moll (vers 1930) retrouvée et restaurée à Berlin. DR
Arts visuels Arts plastiques Publié le 26/10/2017
Les réquisitions et pillages d'œuvres d'art par les nazis, puis les bombardements et trafics qui ont suivi la seconde guerre mondiale, ont fait disparaître un grand nombre de pièces d'art moderne. Seize statues ont été retrouvées lors de la construction d'une station de métro à Berlin. Restaurées, elles font le tour de l'Allemagne.

L’année 2010 a été féconde en découverte d’œuvres d’art qu’on croyait détruites, œuvres que les nazis avaient décrétés dégénérées, retirées des galeries ou musées allemands pour les expositions « d’art dégénéré » que Goebbels fit organiser d’abord en Munich en 1937, puis partout sur le territoire du Reich l’année suivante. C’est en effet en 2010 que les douaniers allemands interpellent Cornelius Gurlitt qui détenait dans son petit appartement de Munich pas moins de 1406 pièces, dont des tableaux de Klee, Matisse ou Picasso (voir notre récit sur l'affaire Gurlitt). Une autre découverte, moins importante, date de cette même année.

Devant le vieil immeuble en brique rouge de l’hôtel de ville de Berlin se dressait, avant les bombardements qui ont détruit la ville en 1945, un pâté de maisons qui n’a pas été reconstruit. C’est une place depuis la reconstruction de la ville, place sur laquelle doit s’élever une nouvelle station de métro. Lorsque, en 2010, les travaux d’excavation ont commencé, les ouvriers sont très rapidement tombés sur les caves et les éboulis des anciennes maisons. Dans l’une d’entre elles, seize statues attendaient leur libération depuis l’arrivée au pouvoir des nazis. C’est en effet dans la mairie qu’ils avaient organisé la partie berlinoise de leur exposition  Entertete Kunst visant à humilier les arts modernes, traités par eux de dégénérés.

 

Ces seize statues ont été entreposées dans un immeuble voisin, au numéro 50 de la Königstrasse. Comment et par qui ? Les recherches ont permis d’établir qu’un expert-comptable, Erhard Oewerdieck avait ses bureaux au quatrième étage de l’immeuble. Or cet homme, avec sa femme, a aidé des juifs au péril de sa vie, recevant pour ses actes le titre de « Juste parmi les nations » devant le mémorial de Yad Vashem. Mais la piste n’est pas la bonne. Les choses se sont passées plus simplement. On découvre en effet qu’au numéro 50, un entrepôt appartenait au ministère de la propagande qui a ordonné, le document a été retrouvé, qu’y soit déposé les statues de l’exposition d’art dégénéré. C’est là qu’on les a déterrées 65 ans plus tard dans un état assez calamiteux.

Restaurées, elles font aujourd’hui le tour de l’Allemagne et sont actuellement exposées à Sarrebrück (jusqu’au 2 février 2018), au Sarreland museum qui y a ajouté des œuvres de sa propre collection également réquisitionnées par les nazis comme art dégénéré. Le Portrait de l’actrice d’Anni Mewes par Edwin Scharff a retrouvé son galbe d’origine. Mais la plupart des pièces n’ont pas eu cette chance. Les bronzes sont altérés, comme la Danseuse de Marg Moll, intégrale cependant, ou en morceaux comme les terres cuites d’Otto Freundlich ou la Femme enceinte d’Emy Roeder dont il ne reste que la tête. Parmi les œuvres ajoutées par le musée, on peut voir des dessins et gravures signés Otto Dix, Marx Beckmann, Edward Munch et George Grosz et des statues d’Archipenko et de Käthe Kollwitz.

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