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Mot de passe oublié ?Sous le grand chapiteau de CIRCa Auch, les gradins sont vides. Le spectateur venu voir Les princesses est dirigé vers une petite structure autonome. Une fois le seuil franchi, il se retrouve dans une gloriette métallique où se côtoient le végétal et l’animal, et où la lumière multicolore et tournoyante habille l’espace en un tableau grandeur nature et en mouvement. Après quelques pas, une charmante princesse allant et venant sur sa balançoire aux côtés de son prince offre à chacun une barbapapa bleue, tandis que d’autres personnages proposent sur un plateau des petits verres à liqueur. Ils sont quatre, habillés de blanc, leur regard est fermé, absent. Cet accueil surprend un public qui ne répond pas toujours à l’invite, préférant s’installer sagement sur les gradins en attendant que le spectacle commence. Or il a déjà commencé, dans cette sollicitation vers le public. La musique, magnifiquement incarnée par la compositrice Marjorie Karlin, fait s’écouler des chansons. Elles donnent corps à une succession de scènes dans lesquelles apparaît une princesse endormie portée par deux lapins gris en costume, une danseuse à la fois coquine et innocente, un prince sûr de séduire. Comme dans les contes, la princesse se réveillera avec un baiser, c’est écrit sur un panneau qui s’adresse aux spectateurs et spectatrices. Du regard, le public est invité à se rendre sur la piste, contribuant à la poursuite du récit.
Jeux d'amour et de vie. Dans cette cage feutrée, gentiment colorée, aux personnages sortis d’un livre de notre enfance, le public n’a pas le statut de spectateur passif. Invité à rêver, à sourire, à rire, à retrouver l’innocence et le bonheur des premiers émois, la ruse des jeux de balles, à avoir peur des envolées de la princesse voltigeuse, au plaisir de chanter, de donner ou d’accepter un baiser, de serrer dans ses bras. Et la magie opère. Étonnant alors que quelques minutes auparavant le public était prêt à l’immobilité. Le rite de la distance se rompt peu à peu. Au fil du spectacle, les attitudes se modifient, le spectateur se prépare à être sollicité, voire précède la demande. Le prince bombe son torse de séducteur, attirant les rires, la princesse croque la pomme, pose des œillades audacieuses, se love contre le corps de l’autre. Le registre corporel est celui de l’amour. Les paroles des chansons ne laissent pas de doute. La forme soignée à l’extrême n’a d’égal que la perfection du timing, la pose d’une main, le jeu de lumière, l’escalade charmante des princesses et des princes, les regards langoureux.
Dans un décor et des costumes au kitch assumé, on est loin de la mièvrerie. Le jeu de la pomme, l’air suffisant du prince, les regards innocents, sont contrebalancés par les paroles des chansons, nous menant sans ambages à l’amour, au sexe, à une intimité problématique, à l’inquiétude de vieillir. Une vraie vie de princesse !
Les princesses, Conception : Marie Jolet, Cie Cheptel Aleikoum. Création collective avec la collaboration artistique de Christian Lucas. Interprètes : Maxime Mestre, Marie Jolet, Marjolaine Karlin, Julien Michenaud, Carine Nunes, Marc Paretti.
Les 21, 22, 24, 25, 27 et 28 octobre : festival CIRCa Auch / Les 4 et 5 novembre : Cirque en marche - Alès / Du 15 au 17 décembre : Le CREAC - Fête de la Morue - Bègles / Du 24 au 26 janvier : La Rotonde - Luxembourg / Du 2 au 4 mars : Le Théâtre, SN Orléans - Orléans / Les 17 et 18 mai : Saison culturelle - Pantin.
En 2018 : les 30 novembre et 1er décembre, Scène nationale Narbonne. Les 6 et 7 décembre, Théâtre La Durance à Chateaux Arnoux. Les 18 et 20 décembre, Scène nationale de Gap.