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« En attendant les hirondelles » algériennes

par Jacques Moulins
Mehdi Ramdani et Hania Amar dans
Mehdi Ramdani et Hania Amar dans "En attendant les hirondelles" de Karim Moussaoui. DR
Cinéma Film Publié le 08/11/2017
"En attendant les hirondelles" premier film de Karim Moussaoui dépeint, en trois histoires, une Algérie figée dont les personnages espèrent, sans savoir comment s'y prendre, le printemps. Une nouvelle génération de créateurs, moins dans le règlement de compte que dans l’urgence du changement, marque ses pas.

Qu’attendent-ils des hirondelles, ces « hommes et femmes aux prises avec la vie, le quotidien et l’histoire récente de l’Algérie » ? En décrivant ainsi le scénario, Karim Moussaoui embrase de fait l’ensemble de la société algérienne qui justement ne sait ce qu’elle attend, coincée dans « l’impasse d’une situation qui a trop duré, le résultat d’un système de fonctionnement et de pensées paradoxales ». C’est à travers trois histoires, en fait celle de deux hommes et d’une femme en prise avec une femme et deux hommes, que le scénario va déployer son intrigue simple mais redoutablement efficace. Histoires qui toutes signent le renoncement du particulier dans une société où tout est figé à l’image de son président. No future, pourrait dire les protagonistes, s’il ne restait inexorablement au fond de chacun cette étincelle qui fait la révolte du désespoir.

Une pesanteur qui empêche tout mouvement. Le film s’engage dans différents milieux, différents décors, et évite les termes politiques du conflit, choisissant des bouts de vie à ces moments singuliers où le drame se noue. Mais ni un drame grec, ni un drame cornélien. Les personnages sont des personnages de tous les jours et leur drame ne fait pas leçon. Ce qu’ils vivent et affrontent peut advenir, et souvent advient, à tout un chacun. Sauf que les longs plans sur paysages montagneux ou urbains, la lenteur du récit et des échanges entre personnes pénètrent la conscience comme une pluie mouille le corps. Ils créent une pesanteur qui empêche tout mouvement, qui pousse, malgré qu’on en est, à la résignation. La seule porte vers autre chose, ce sont les individus qui peut-être pourront l’ouvrir, faiblement, mais c’est déjà ça qui maintient la dignité. L’entrepreneur contre son contrat corrompu, la future mariée avec un amour ancien, le citoyen face aux violences des terroristes. Des scènes de musique et des chorégraphies étonnantes ajoutent à cet espoir.

Le quadragénaire Karim Moussaoui réussit ainsi un premier long métrage qui, lui, donne espoir sur le jeune cinéma algérien. S’il faut quelques minutes pour entrer dans le jeu des acteurs qui participe de cette distance amère sur une société bloquée, on se laisse ensuite transporter dans un pays où, à l’instar des images de la première histoire sur des immeubles en construction à l’abandon, on attend la suite.

 

En attendant les hirondelles, de Karim Moussaoui. Sur les écrans le 8 novembre. Scénario de Karim Moussaoui  et Maud Ameline. Avec Mohamed Djouhri, Sonia Mekkiou, Mehdi Ramdani, Hania Amar, Hassan Kachach, Nadia Kaci et la participation d’Aure Atika. Le film a représenté l'Algérie au festival de Cannes 2017.

 

BIO

Karim Moussaoui, né en 1976 à Jijel en Algérie, est l'auteur de trois courts métrages et d'un moyen métrage remarqué par plusieurs festivals Les jours d'avant. Membre fondateur de l'association culturelle de promotion du cinéma Chrysalide à Alger, il a assuré la programmation cinéma à l'institut français d'Algérie. Puis a travaillé dans le cadre d'une résidence de la Cinéfondation du Festival de Cannes et des Ateliers d'Angers. En 2016, il est lauréat de la Fondation Gan pour le cinéma.

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