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« El Presidente », quand le fantastique bouscule le politique

par Jacques Mucchielli
Le président argentin (Ricardo Darin) et son assistante (Erica Rivas) dans
Le président argentin (Ricardo Darin) et son assistante (Erica Rivas) dans "El Presidente", film de Santiago Mitre. DR
Cinéma Film Publié le 03/01/2018
A 3 000 mètres d'altitude, dans les neiges de la Cordillère chilienne, se joue un drame plus faustien que shakespearien, dit son créateur, le cinéaste argentin Santiago Mitre qui a réuni une pléiade de grands acteurs américains pour "El Presidente".

Emilio ou Emiliano ? L’électricien qui se rend à 5 heures du matin au palais présidentiel argentin a du mal à passer le contrôle en raison d’une mauvaise transcription de son prénom. C’est l’étrange scène d’ouverture du film du réalisateur argentin Santiago Mitre, El Presidente (bien qu'espagnol, ce titre n’est pas l'original du film, La Cordillera). Cette étrangeté perdure tout au long du film, c’est elle qui donne réalité à ce subtil équilibre de la gouvernance politique au plus haut niveau. Elle, plus une dose de fantastique qui arrime cette haute sphère à notre humble humanité.

Dans une station de ski de la Cordillère des Andes, à 3 000 mètres d’altitude, la présidente chilienne reçoit ses homologues de tous les pays d’Amérique du sud, plus le Mexique, pour un sommet destiné à assurer l’indépendance énergétique face à l’encombrant voisin nordiste. Des Etats-Unis qui ne vont pas manquer de s’immiscer dans une réunion où ils se sont pas invités en la personne d’un sous-secrétaire d’Etat magistralement interprété par Christian Slater. Outre l’acteur américain, la distribution réunit les grands acteurs argentins Ricardo Darin, Erica Rivas, Gerardo Romano et Dolores Fonzin, les chiliens Paulina Garcia et Alfredo Castro, le mexicain Daniel Gimenez Cacho, l’espagnole Elena Anaya.

 

 

« Quel est le prix à payer ? ». Le président argentin Hernan Blanco va cristalliser sur sa personne tous les questionnements qui fond la gouvernance politique. Président qui se qualifie de « normal » (mais pas vraiment de rapport avec François Hollande) par opposition aux anciens présidents péronistes jamais nommés, il va régler à sa façon et dans l’ambiguïté les différentes tensions qui anime sa présidence. D’abord l’éternelle concurrence avec l’autre poids-lourd du continent, le Brésil, dirigé par un président charismatique. Puis la pression d’un président mexicain présenté comme le cheval de Troie des Etats-Unis. Ensuite son propre problème de représentativité face à ses adversaires intérieurs et aux personnalités envahissantes de son cabinet. La question de la corruption qui le poursuit du temps où il était gouverneur de la Pampa est également présente et va prendre des proportions inédites. Et les problèmes familiaux, incarnés par sa fille qui le rejoint, s’inviteront au sommet. C’est par eux que s’introduit l’élément psycho-fantastique qui va lier cette personnalité complexe, suspecte même, interprétée par l’excellent acteur Ricardo Darin. Quand on exerce les plus hautes fonctions, « quel est le prix à payer ? s’interroge Santiago Mitre qui répond : La vie privée, la santé, la famille ». Cela donne, au final, un film où l’exacerbation du réel par le fantastique recule les limites du genre thriller politique.

 

El Presidente (La Cordillera), film argentin de Santiago Mitre. Avec Ricardo Darin, Erica Rivas, Dolores Fonzi. Sortie le 3 janvier 2018.

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