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Karl Marx fête, déjà, ses 200 ans

par Jacques Moulins
Arte diffuse plusieurs émissions dont une série web Maire meets Marx. DR
Arte diffuse plusieurs émissions dont une série web Maire meets Marx. DR
Livre Sciences Humaines Publié le 01/05/2018
Eh oui ! 200 ans, ce 5 mai 2018, que Karl est né à Trier (Trèves). Un bicentenaire aussi controversé que l'œuvre du philosophe, journaliste, économiste, sociologue et homme politique que fut le jeune Rhénan. Bref aperçu de l'œuvre et de sa postérité.

Il y aura deux cents ans, ce 5 mai 2018, que naquit dans la maison de Trier (Trêves) en Rhénanie qui lui sert aujourd’hui de musée, Karl Heinrich Marx, deuxième fils d’Henriette et d’Heinrich qui auront ensemble huit enfants. Personne ne pouvait alors imaginer que son nom serait connu du monde entier, longtemps après sa mort le 14 mars 1883. Personne n’imaginait que le « marxisme » serait une théorie des plus réputées et des plus controversées de la pensée humaine. Personne non plus qu’en son nom, les plus belles libérations et les pires atrocités seraient réalisées. Travailleur infatigable, Karl Marx est avant tout philosophe. C’est par et pour la philosophie qu’il deviendra journaliste, économiste, sociologue et penseur du communisme.

 

« Transformer » le monde. S’il n’est pas vraiment le premier philosophe à vouloir « transformer » le monde au lieu de se contenter de « l’interpréter » (XIe de ses Thèses sur Feueurbach), il est le premier à s’être si politiquement impliqué dans cette transformation. Lorsque le jeune Karl commence à écrire, il est vrai que la révolution industrielle crée des fortunes considérables et assujettit les ouvriers, notamment les enfants, sans aucun scrupule, les plongeant eux et leurs familles dans les pires conditions d’existence que l’humanité a jamais connues. Il en sortira, avec la complicité de son ami Friedrich Engels, son œuvre la plus courte et la plus lue, le Manifeste du parti communiste. Mais aussi son œuvre fondamentale qui lui demandera toute une vie, Le Capital. On sait la filiation qui s’en suivra, notamment avec Lénine et la dictature du prolétariat. Le sanguinaire dirigeant cambodgien Pol Pot, Staline et Mao ont établi au nom de leur marxisme des dictatures qui ont avant tout privé de liberté jusqu’aux prolétaires qu’ils prétendaient libérer. Et réalisé les plus importants massacres humains de l’histoire. Mais de son vivant, lisant les interprétations que des communistes français ont fait de ses œuvres, Karl dira : « Tout ce que je sais, c’est que moi je ne suis pas marxiste ».

 

Le « matérialisme historique ». Mais Marx c’est surtout le « matérialisme historique », une lecture du monde et de l’histoire humaine qui va bouleverser toute la pensée. Lecture dont les fondements sont résumés dans la VIe de ses Thèses sur Feueurbach d’une formule qui restera célèbre : « L’essence de l’homme (…) est l’ensemble des rapports sociaux ». En définissant ainsi la « nature » humaine, Marx ouvre la porte à des recherches de tout type qu’interdisaient auparavant les religions. Et rend l’humanité seule responsable de l’homme. Il va ainsi libérer non seulement les études, en sciences humaines notamment, mais également ouvrir la voie aux utopies libératrices qui marquent encore la vie politique et sociale de nos sociétés en définissant l’origine des oppressions dans les conditions économiques, sociales et idéologiques. Mais bizarrement, Marx est peu étudié à l’université, grand nombre d’enseignants de philosophie continuant à lui refuser une place dans la philosophie allemande qu’il a particulièrement analysé, avec Engels, dans L’Idéologie allemande.

 

Continuité de Marx. Au XXe siècle, des historiens de l’école des Annales aux philosophes de l’école de Francfort avec Theodor Adorno ou Herbert Marcuse, en passant par Antonio Gramsci, Georg Lukacs ou Jacques Derrida, le marxisme suit des développements infinis. Aujourd’hui, la référence à Marx connaît des réalités bien différentes, si ce n’est franchement contradictoires, comme il se doit d’ailleurs pour toute pensée en évolution. Les qualificatifs « marxien » ou «  marxisant » sont apparus pour signaler une parenté plus détachée du communisme. Et l’on s’amuse sur Marx avec le réalisateur Woody Allen (« marxiste tendance Groucho ») ou l’ancien ministre grec des finances, Yannis Varoufakis, (« marxiste libertaire »).

 

Les manifestations du bicentenaire. Ce bicentenaire est célébré un peu partout dans le monde. La chaîne européenne Arte y consacre une série web Marie meets Marx et trois documentaires (tous visibles sur le site d’Arte) : Karl Marx, penseur visionnaire de Christian Twente (2018), De Marx aux marxistes, de Peter Dörfler (2018) et Le phénomène Karl Marx de Torsten Striegnitz et Simone Dobmeier (2017) avec des commentaires du philosophe Slavoj Zizek. De nombreux colloques sont annoncés. Plusieurs livres sont publiés dont Marx, une passion française, ouvrage collectif dirigé par J.N. Ducange et A. Burlaud aux Éditions La Découverte, Introduction à la pensée de Marx de Denis Collin aux Éditions du Seuil,  Marx critique du libéralisme du philosophe italien Stefano Petrucciani aux Éditions Mimesis ou Le Capital, 150 ans et pas une ride du phisolophe Pigeard de Gurbert aux Éditions Croquant. Signalons également des nouvelles traductions de ses œuvres aux Éditions Allia et aux Éditions sociales, et le film Le jeune Karl Marx de Raoul Peck (2016) sorti en DVD.

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